- Edition 2023
- Edition 2022
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- Kossi Gerard Adzalo : La tâche du traducteur, une tâche difficile mais pas impossible.
- Edition 2021
- Edition 2020
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- Stéphanie Folio- Paravéman : La facture évolutive du Tambour Malbar. Un essai d'organologie analytique
- Charlotte Gibelin : Ancrages psychanalytiques en recherche universitaire : enracinement conceptuel, transmission et décentrement
- Lia Perrone : Les luttes ouvrières de l’automne 1969 en Italie : images de l’ouvrier(e)-masse dans la littérature
- Mouhamadou Thioune : Le règne de Charles Quint au XVIème siècle: entre puissance et déséquilibre
- Edition 2019
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- Vanessa Bonnet : Un palmier peut en cacher un autre : Entre réflexion linguistique et nonsense dans la nouvelle « I Bought a Palm-Tree » de Mervyn Peake
- Colette Courtois : Occurrences musicales dans les entrées officielles dynastiques dans la capitale de l’ancien comté de Nice
- Daniela Pena Mosquera : Une approche de la cosmogonie et de la musique des communautés Kichwas de Cotacachi et Otavalo, Andes-Équateur
- Mouhamadou Thioune : Le concept d’espace transmigratoire dans les récits de métamorphose. Exemple du Lazarillo de Tormes de 1555.
Résumés de théses
- Théses en cours
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- Gérard Adzalo : Erreurs de traduction, intraduisibilité des œuvres africaines et décentrement de l’écriture : Ahmadou Kourouma, Chinua Achebe, Wole Soyinka.
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Les études ne manquent pas qui relèvent des erreurs dans la traduction des œuvres de la littérature africaine, notamment dues à une connaissance insuffisante de l’arrière plan non seulement linguistique (modifications sémantiques injustifiées, traductions approximatives, contresens, etc.) mais également géohistorique et culturel. Néanmoins, ce genre d’erreurs n’est pas spécifique au contexte de la littérature africaine : toute œuvre littéraire, quelle qu’elle soit, africaine ou non, n’est traduisible qu’en prenant en compte ces différentes dimensions.
En réalité, la plupart de ces études partent du principe que ces œuvres sont, justement, traduisibles, au sens traditionnel du terme. On partira au contraire du principe que toute œuvre est, par définition, « intraduisible », au sens que lui donne, notamment, Barbara Cassin : l’original n’est jamais totalement traduisible du fait même du changement de langue que cela présuppose. Cela ne veut pas dire pour autant que la traduction est nécessairement inférieure à l’original : on considérera au contraire, comme le fait Borges dans « Les traductions homériques » ou, plus récemment, dans le cadre des analyses de Gérard Genette, que l’œuvre n’est pas à situer uniquement dans l’original, mais également dans ses différentes versions que sont ses traductions éventuelles.
Dans une telle perspective, la question ne se réduit plus à atteindre la traduction parfaite, car elle est par définition impossible. En effet, même en ne commettant a priori aucune « erreur » au sens traditionnel du terme, ce que l’on peut supposer être le cas, notamment, dans le cas de l’autotraduction, il n’en demeure pas moins que la meilleure des traductions possibles sera toujours différente de l’original. C’est justement ce qui fait tout l’intérêt d’une traduction : elle révèle de l’œuvre ce qui ne peut apparaître qu’à travers sa traduction et que l’original ne peut contenir qu’en puissance.
C’est à cette lumière que l’on réexaminera la question des « erreurs » de traduction, qu’il s’agit de problématiser au lieu de considérer qu’il va de soi de définir ce que sont de telles « erreurs ». On s’appuiera essentiellement sur les traductions en langue anglaise des œuvres francophones d’un auteur comme Ahmadou Kourouma et, dans l’autre sens, sur les traductions françaises des œuvres anglophones de Chinua Achebe et de Wole Soyinka.
Ce qui nous semble la question centrale n’est pas de savoir si la traduction de telle ou telle œuvre doit être « sourcière » ou « cibliste », mais d’analyser comment les traductions existantes permettent de traduire l’intraduisibilité du décentrement de l’écriture (H. Meschonnic) propre aux œuvres de la littérature africaine figurant dans notre corpus. - Vanessa Bonnet : Le paradoxe structurel du nonsense dans les œuvres de Mervyn Peake
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Notre étude porte sur l’utilisation du nonsense par l’auteur britannique Mervyn Peake, et sa fonction à la fois de défamiliarisation de la langue et de structuration de son œuvre. Chez Peake, le nonsense paraît avoir une fonction ambiguë, puisqu’il fragmente et unifie le discours, un discours lui-même sans cesse double car à la fois linguistique et pictural. Dans son œuvre, les personnages ont bien souvent du mal à se comprendre, car le langage de l’un n’est pas le langage de l’autre : signifiants et signifiés sont souvent dissociés. La digression, qu’elle prenne ou non l’aspect d’un poème nonsensique, est très fréquente, donnant ainsi l’impression que la langue s’emballe et marche à vide. Le recours presque systématique à l’illustration instaure une impression d’ambivalence, tout comme l’utilisation du registre parodique, indissociable du genre nonsensique, qui a pour effet de tenir le lecteur à distance, en donnant l’impression que les choses sont dites, pour aussitôt être niées.
Cependant, si le nonsense donne lieu à une langue subversive, elle n’en n’est pas moins jouissive, voire structurante, car elle redéfinit notre rapport au monde et à soi. Ainsi le jeu et la création poétique provoquent une instabilité propice à l’expression d’un Je qui tente sans cesse de s’affranchir des normes. Quant à la parodie, elle produit un discours en biais, dont l’auteur se sert pour contourner les mots qui n’expriment pas toujours de manière juste sa propre réalité. L’univers de Peake semble ainsi tout entier structuré par l’instabilité de la langue qui représente à la fois un handicap et une richesse. Les mondes qu’il crée sont quelque part inaccessibles et déjà tous de l’autre côté du miroir, résultat d’un langage qui nous éloigne du réel tout en le réfractant en une multitude de mondes imaginaires. - Dominique Floret : Traces d’esclavage en héritage : blessures, trauma et désubjectivation. La plasticité psychique en question(s).
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La traite négrière et l’esclavage transatlantique, basés sur une idéologie raciste, représentent plusieurs siècles de violences interpersonnelles et de traumatismes répétés. Déshumanisant, l’esclavage a induit au niveau psychologique des processus de destruction massifs. Cette thèse en psychologie clinique analyse les traces de ce passé fondateur de la culture antillaise : elle explore les racines traumatiques de l’héritage de l’esclavage ainsi que ses manifestations contemporaines. Elle présente les résidus psychiques de ce traumatisme historique à travers l’élaboration de la culture créole, de l’identité antillaise et des pratiques sociales.
- Warda Khemilat : DE #METOO AU PLAN D’ACTION NATIONAL CONTRE LES VIOLENCES SEXUELLES ET SEXISTES.
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Ce projet de thèse en Sciences de l’Information et de la Communication a pour ambition d’analyser la façon dont les récentes affaires concernant les violences faites aux femmes ont impacté les politiques locales et les discours collectifs. Il s’agira ainsi de s’intéresser aux processus de médiatisation des récentes mobilisations féministes #metoo et #balancetonporc ainsi qu’aux applications politiques concrètes qui résultent de ces mouvements sociaux. Nos recherches tenteront de mettre en lumière, les différentes retombées qu’ont eues les mobilisations féministes sur les réseaux sociaux à travers l’étude comparée des programmes d’action locaux mis en place dans les villes de Nice et à Paris. Le traitement politique et médiatique d’autres questions d’actualités suscitées par les récentes mobilisations féministes seront également étudiées au niveau national et territorial : dans la sphère publique -harcèlement de rue, harcèlement au travail-, et dans la sphère privée –viol conjugal, violences domestiques etc.-.
Ce travail de recherche, proposera ainsi d’une part, de nous intéresser aux mobilisations féministes et aux réseaux d’acteurs impliqués dans ces polémiques publiques –médias, personnalités féministes et politiques etc.- ; et d’autre part, d’analyser les impacts régionaux et nationaux suscitées par ces affaires et mobilisations. Cette analyse comparée permettra ainsi de comprendre comment la mise sur agenda politique et médiatique de l’égalité entre les femmes et les hommes a modifié la perception « de ces nouvelles problématiques sociales ». - Simona OLIVA : Les romans de Salman Rushdie au prisme de l’intermédialité
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Notre étude s’intéresse à l’intermédialité, un concept qui fait écho à l’éloge de l’hybridité, à la fois thématique et formelle, au cœur de la poétique de Salman Rushdie, et qui incarne littéralement le processus de pluralité, greffe, bigarrure et métamorphose à l’œuvre dans ses romans. Il s’agira d’abord de préciser la notion d’intermédialité littéraire, qui demeure un domaine encore peu exploré en raison de la difficulté pour l’écriture d’intégrer matériellement des systèmes sémiotiques propres à d’autres médias. Cette approche se justifie tout d’abord par le foisonnement, dans le récit rushdien, de références qui parcourent l’ensemble du paysage médiatique moderne, du cinéma à la peinture, en passant par la musique, l’architecture, les bandes dessinées et la photographie, mais aussi par son écriture polymorphe, empreinte d’une souplesse et d’une porosité qui rendent possible l’incorporation d’autres pratiques esthétiques. Ce travail de recherche se proposera donc d’examiner les formes que prend ce syncrétisme formel, mais aussi d’analyser les cohabitations problématiques, les résistances qui subsistent malgré le projet de décloisonnement et de transgression des frontières, cher à Rushdie. L’œuvre littéraire se pose alors comme un chantier ouvert, invitant le lecteur à modifier ses mécanismes de lecture pour « jouer » avec le texte, de faire une expérience presque sensorielle de l’intermédialité, en décelant les indices disséminés partout dans le récit afin de tenter de démêler ce brouillage de codes, de langages et de techniques. Cependant, si cette hybridité intermédiale traduit un vrai désir d’inclusion avec ses allusions à la culture populaire, elle peut aussi aboutir à une forme d’élitisme avec une complexité intrinsèque relevant d’une culture savante, ou encore à une quête d’hypermédiatisation reflétant une volonté de rassembler tous les publics.
- Miki SAKUMA : Les Dimensions Cachées du Sous-Titres des Films Japonais : Le Cas de "Voyage à Tokyo" par Yasujirō Ozu
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Le fil conducteur de la thèse consiste à analyser dans quelle mesure la « dimension cachée » - référence au titre de l’ouvrage d’Edward T. Hall (1966), qui entend par là la langue aussi bien que la culture, comme également dans un autre de ses ouvrages, Le langage silencieux (1959) - des films japonais peut apparaître à travers la traduction, que ce soit à travers le sous-titrage et le doublage mais également au sens plus large de « traduction intersémiotique » (cf. Roman Jakobson), pour inclure la dimension de la communication interculturelle. Parallèlement, nous allons mettre en exergue l’aspect créatif du sous-titrage, autrement dit comment pourrions-nous traduire l’intraduisible du cinéma japonais ? Afin d’atteindre ces buts, cette thèse nécessite une approche interdisciplinaire : théories de la traduction, mais aussi traduction audiovisuelle et les études sur l’adaptation cinématographique. En dehors de l’introduction générale et de la conclusion, le plan de ma thèse est actuellement divisé en quatre parties. Première partie : « Théories et méthodes pour l’analyse des dimensions cachées de la culture » ; deuxième partie : « La compréhension de Voyage à Tokyo et le caractère unique de la culture et de la langue japonaises » ; troisième partie : « Le sous-titrage des films japonais du point de vue de la traductologie audiovisuelle » ; quatrième et dernière partie : « L’analyse de Voyage à Tokyo du point de vue des Adaptation Studies ». On s’aperçoit que, bien que certains éléments linguistiques et culturels des films japonais soient difficiles à traduire, certains traducteurs de films japonais ont réussi à traduire des références de manière créative. Les chercheurs en traduction audiovisuelle ont tendance à mettre l'accent sur ce qui est « perdu » dans la traduction, mais cette étude souligne au contraire l'importance à mettre l'accent sur ce qui est gagné dans la traduction.
- Théses soutenues
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- Charlotte Collet : UNE DICTATURE DES CORPS Quel destin pour la Pulsion à l’ère des technosciences ?
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Ce travail de recherche se propose d’interpréter les transformations des représentations du corps au cours des siècles passés pour venir mettre en exergue les nouvelles thérapies technoscientifiques dans le domaine bio-médical et ce qu’elles viennent nous révéler du traitement du corps pathologisé de l’homme hypermoderne.
Nous nous appuierons sur le modèle de la chirurgie bariatrique, traitement technoscientifique de l’obésité, pour en soulever les conséquences organiques et psychiques qui nous poussent à interroger le progressisme scientifique, notre condition humaine ainsi que l’Éthique. Nous entrevoyons ce traitement de l’obésité comme la métaphore d’une dictature (du corps) médicale qui conditionne notre nouvelle politique du vivant et vient lier la santé – l’humain - au marché. - Colette Courtois
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La fête, celle qui marquait les temps forts de l’année sous l’Ancien Régime dans la région niçoise est ici prise en compte. Nous nous proposons d’étudier l’aspect social complexe du phénomène festif. Empreinte du sacré, du politique, du social, du divertissement ou du rituel, parfois germe de violence ou au contraire canalisée et contrôlée. Une typologie de la fête est établie dans ses cadres, ses fonctions et attributs : fêtes calendaires, exceptionnelles, ponctuelles, politiques ou officielles. Quels sont les organisateurs, les financeurs, les investigateurs, les participants ? Parallèlement, malgré la rareté des documents témoins, une typologie de la musique et des musiciens permettra de mettre en relation la fonction de la musique au sein de la fête. Quels sont les statuts des ménétriers, des musiciens d’église, des musiciens professionnels, semi-professionnels ou amateurs, religieux, vicaires ? Quel est l’impact de ces musiciens sur la vie festive locale et dans une certaine construction identitaire niçoise ? Le rôle majeur des ménétriers étant l’accompagnement de la danse, celle-ci est à considérer de façon approfondie. Tout comme pour les musiciens, les archives décrivent plus facilement la danse en tant que productrice de troubles sociaux qu’élément unificateur. Parmi les sources écrites à notre disposition se trouvent des ordonnances, témoignages, chroniques et récits. Les registres paroissiaux permettront de matérialiser les occurrences des différentes fêtes familiales, difficilement décelables autrement.
Ce triple travail taxinomique aura tout d’abord pour raison la mise en adéquation des diverses catégories. Mais son principal intérêt sera de déterminer les éventuelles spécificités de la fête niçoise. Il s’agit, pour ce travail de recherche de procéder à une recherche pluridisciplinaire, étant donnée la complexité du phénomène festif, dont l’étude nécessite à la fois le recours à l’histoire, l’anthropologie, l’ethnomusicologie, l’ethnologie de la danse, l’iconologie. Il s’agit également de porter un regard ethnologique et ethnomusicologique historique. La recherche se veut d’être à la fois verticale par sa diachronie et horizontale par l’étude comparative transversale. Puisse cette étude combler un vide dans l’histoire sociale de la fête, de sa musique et de sa danse. - Stéphanie Folio-Paravéman : Créolisation et usages du tambour malbar dans l’espace social réunionnais. Ethnomusicologie d’une pratique symbolique en perpétuel réajustement.
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D’origine indienne, le tambour malbar est un tambour à une membrane sur cadre circulaire qui, à La Réunion, est utilisé dans le cadre des manifestations religieuses hindoues notamment depuis le XIXe siècle. Fortement relié à cette circonstance en raison de sa principale fonction d’appel des divinités et en tant qu’instrument de musique sacrée, le tambour malbar a longtemps été réservé à un usage exclusivement religieux. Si cette culture musicale est véhiculée à travers les thèmes littéraires, par exemple, de la musique créole réunionnaise du XXe siècle, c’est à partir du milieu des années 1980 qu’un nouveau regard est porté sur cet instrument, par certains artistes locaux, et en particulier à travers son intégration physique au sein des musiques de concert. Cette thèse sur les usages du tambour malbar dans l’espace social réunionnais vise à décrire les phénomènes de créolisation de ce tambour qui émanent non seulement de la diversification de ses usages depuis cette période mais également de la relocalisation des pratiques culturelles d’origine indienne dans l’espace social réunionnais dès le XIXe siècle.
Le tambour malbar peut être considéré comme une pratique symbolique en perpétuel réajustement dans la mesure où il répond aux attentes spécifiques de chacun des contextes au sein desquels il est simultanément utilisé. Source d’appauvrissements pour certains, de richesses pour d’autres, l’éclatement des usages du tambour malbar dans l’espace social réunionnais donne à cet instrument une identité à la fois plurielle et contrastée qui, nécessairement instable, le transforme continuellement (que ce soit au niveau de sa facture comme de sa musique) en même temps que ses circonstances de jeu évoluent. Aussi ce travail de thèse propose-t-il une approche du tambour malbar selon les différents points de vue à partir desquels il est possible de l’aborder aujourd’hui à La Réunion. - Charlotte Gibelin : De l’enracinement psychique : Eléments métapsychologiques pour une clinique du Sujet et du lien social
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La visée de cette thèse est de mettre au travail l’enracinement – terminologie avancée à l’origine dans le champ philosophique – du côté de la clinique et de la conceptualisation métapsychologique. Il semble, en effet, au fil de nos recherches et de notre praxis, que la dimension d’enracinement, tout comme celle du déracinement, touchent au plus près du champ de la clinique du sujet et du lien social. En quoi donc l’enracinement, cette notion philosophique avancée par Simone Weil1, peut-il nous éclairer dans notre pratique de psychologue, tant dans la dimension clinique que collective ?
L’actualité du lien social expose le sujet face à de nouvelles formes de déracinement (exil, chômage, crise, délitement social, burn-out, confrontation à des passages à l’acte terroristes...). C’est ce dont viennent témoigner les discours de certains de nos patients ainsi que l’apparition de nouvelles manifestations symptomatiques. Au-delà des faits du monde contemporain, le vécu subjectif déroulé à travers les récits de chacun (patients, écrivains, artistes, psychanalystes, sociologues…) donne à entendre la manière dont le sujet a à faire avec la question du déracinement. Bien souvent, la mauvaise rencontre avec le réel laisse le sujet en proie à un déracinement psychique et langagier, temps dans lequel il est « sans voix » devant ce qui ne peut être représenté. La question se pose alors du traitement du déracinement auquel le sujet de la civilisation est confronté en tant qu’être de langage.
Simone Weil (1949) en son époque situe l’enracinement de l’individu au rang de « besoin de l’âme humaine ». Comment alors, dans la spécificité de notre pratique, pouvons-nous accueillir le sujet déraciné ? La posture éthique du clinicien ne serait-elle pas de soutenir les modalités d’enracinement propres à chaque sujet ? Ainsi, le sujet vient mettre au travail ses potentialités à se ré-enraciner de manière inédite, par l’acte de création signifiante, et dans cette démarche, « faire-œuvre » de son déracinement.
Au fil de notre cheminement, nous aurons à considérer l’enracinement dans une conceptualisation dialectique (et non un clivage) enracinement/déracinement. Dialectique qui s’éprouvera dans l’espace thérapeutique mais aussi dans une lecture contemporaine du lien social et ses mouvements. La dimension d’espace ne sera pas sans éclairer notre propos et sera à entendre comme espace psychique, thérapeutique, sociale, culturelle, artistique, littéraire… : autant de lieux d’expression et d’expérimentation du nouage dialectique enracinement/déracinement.
Les rencontres occasionnées par mon parcours ont éveillé chez moi l’intérêt et la curiosité de la recherche. Elles prennent leur source parmi d’autres, dans une expérience de déplacement et de décentrement en Afrique en service de psychiatrie, tout comme dans mon quotidien professionnel de praticienne sur le secteur autochtone niçois. Il s’agit, dans la démarche méthodologique de recherche, d’un enchevêtrement de mouvements de déplacements, de décentrements et de retours, en ne perdant pas de vue les points d’enracinement qui forgent notre pratique, tout en les pensant du côté de la création, de la nouveauté, de l’actualisation. La confrontation à un Ailleurs sera pour notre part une véritable méthodologie de recherche et de réflexion quant à notre objet de départ : l’enracinement.
Ces différents sites de ma pratique de clinicienne et les questionnements qui y sont associés m’ont orientée vers diverses recherches bibliographiques s’axant sur des références en psychologie clinique, psychopathologie, psychanalyse, anthropologie et philosophie, sans oublier les perspectives artistiques, poétiques et littéraires, qui apportent un précieux éclairage à la thématique choisie. Nous aurons, de ce fait, à penser l’enracinement dans une démarche de décentrement, amenant ainsi à une vision plurielle qui articule plusieurs champs disciplinaires, avant de nous recentrer sur l’opérationnalité clinique du concept.
En somme, les dispositifs de psychothérapie et d’analyse constituent, de notre point de vue, une invitation faite au sujet à mettre au travail et à construire des modalités d’enracinement dans le lien à l’autre, par les médiations du langage et de la parole. Ainsi, nous entendons proposer un modèle dialectique enracinement/déracinement parlant, tant dans la théorisation des mouvements du lien social actuel que dans la dimension individuelle de la construction psychique. - Monica Ramo : L’univers poétique de Giuseppe Conte
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Cette thèse porte sur les recueils poétiques de Giuseppe Conte (Il Processo di comunicazione secondo Sade, 1975; L’Ultimo aprile bianco, 1979; L’Oceano e il Ragazzo, 1983/2002; Le stagioni, 1988; Dialogo del poeta e del messaggero, 1992; Canti d’Oriente e d’Occidente, 1997; Nuovi canti, 2001; Ferite e rifioriture, 2006; Poesie, 1983-2015, 2015). Il s’agit d’une étude littéraire qui examine les thématiques, les choix stylistiques et l’expérience culturelle qui sous-tend la poétique de l’auteur. Les poèmes de Conte expriment une vision personnelle du monde, de la société, de l'homme et des différentes cultures dont l'écrivain italien s’est nourri à travers sa formation, ses études, ses voyages, ses expériences de vie. Notre étude englobe une réflexion sur le paysage social, politique, et artistique dans lequel s’est développée la poésie de Conte. Cette thèse s’articule en trois parties.
Dans la première partie, l'accent est mis sur le contexte culturel dans lequel opère le poète. Conte se considère toujours comme « étranger » aux mouvements artistiques et littéraires du XXe siècle. Il est important de revenir sur le parcours du poète, à partir de sa conception du mythe et de la nature, considérée comme un antidote au matérialisme de la société occidentale, une conception qui l’a amené à être l’un des fondateurs du « mytho-modernisme ». La deuxième partie propose une interprétation du rôle qu’ont exercé sur la poésie de cet auteur des cultures extra-européennes ou les relations entre Est et Ouest. Enfin, la dernière partie met en évidence certains traits de la poésie de Conte: la métaphore (sur laquelle Conté a écrit des essais fondamentaux), la forme poétique et l’analyse du langage. - Khadija Selmi: «L'écriture de Maria Messina: une voix pour les victimes d'un univers étouffant»
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La thèse porte sur l’œuvre de Maria Messina (Palerme 1887- Pistoia 1944), une auteure sicilienne qui appartient à la catégorie des écrivains oubliés : pendant un demi-siècle, son œuvre a été ignorée par les éditeurs, les critiques et le public. Il s’agit d’une étude philologique, descriptive, analytique et critique de l’œuvre messinienne. Dans la première partie, nous avons présenté le profil biographique de l’auteur : sa formation culturelle en prenant en considération l’influence des grands écrivains siciliens tels que Verga, Alessio di Giovanni ; ses correspondances épistolaires avec ces écrivains et aussi avec Enrico Bemporad en soulignant leur importance pour la présentation de la biographie de l’auteur et pour la compréhension et l’interprétation de ses textes. Puis nous avons étudié la production littéraire de Maria Messina en classant et résumant ses œuvres.
La deuxième partie analyse les "victimes" étouffées qui peuplent les pages de l’œuvre messénienne avec une attention particulière pour les personnages féminins, en examinant « l’univers suffocant » dans lequel vivent ces personnages. L’analyse se concentre principalement (mais pas exclusivement) sur la problématique/question féminine. Les victimes sont des femmes, mais aussi parfois des hommes ou des enfants. Les femmes sont victimes de la misère, de la pauvreté, de l'émigration et surtout du patriarcat et de la société immobile de l’époque, le monde de la petite bourgeoisie. Enfin, nous verrons dans la troisième partie comment l’écriture de Maria Messina constitue une voix pour les victimes d'un univers étouffant.